“Combien de vies humaines doivent tomber avant que l’opportunisme politique tienne compte de l’importance des soins au patient?”

“Combien de vies humaines doivent tomber avant que l’opportunisme politique tienne compte de l’importance des soins au patient?”

24 juin 2020

Incroyable! Cela fait déjà plus d’un an que j’épinglais très explicitement la répartition des compétences dans les soins comme un obstacle à l’efficience. Avec un clin d’œil, je me demandais si notre pays comptait au total 8 ou 9 ministres compétents pour le bien-être et la santé. A l’époque, j’ai été étonné de voir les réactions assez sérieuses. Personnes ne savait en fait précisément combien il y en avait. Petit à petit, on est arrivé avec toutes sortes de calculs à 9 et petit à petit, encore plus d’acteurs dans les soins ont osé identifier ouvertement la division des soins de santé comme un sérieux obstacle. Au cours des derniers mois de la crise du Covid-19, ce constat est ressorti encore clairement et plus de voix encore ont partagé ma position que les soins et le bien-être devaient surtout être intégrés de sorte qu’il n’y ait qu’une seule politique conséquente. Rapidement, c’est devenu une discussion politico-idéologique et communautaire dont il était bien sûr impossible de sortir. Je me suis demandé comme observateur de toute cette mise en scène politique si finalement la politique tournait encore autour du patient. Mais j’ai pensé, en tant que volontariste que je suis, que la sagesse l’emporterait quand même. En effet, le Coronavirus nous a ouvert les yeux sur un point névralgique essentiel. Et qu’est-il arrivé ?

“Je suis tombé de ma chaise de bureau… ou presque.”

J’ai reçu sur mon bureau à l’hôpital deux questionnaires en deux jours de temps. Le premier venait du fédéral. Les directeurs, les médecins-chef, les directeurs infirmiers et les coordinateurs du Plan d’Urgence Hospitalier (PUH) des hôpitaux académiques et généraux, des hôpitaux psychiatriques et des hôpitaux de revalidation sont invités dans un premier questionnaire à formuler une réponse à cinq questions en maximum 2000 signes, de façon succincte donc. On peut y répondre par voie électronique et il faut le faire avant le 13 juillet. Le but : « une première évaluation de la forme, de la constitution et du fonctionnement du PUH » et une « amorce dans une évaluation plus large du cycle de risques”.

Le lendemain, je recevais de la coupole des hôpitaux flamands la demande à la direction générale, le médecin-chef, le directeur infirmier, le coordinateur qualité, le responsable de communication, le conseiller prévention et l’hygiéniste hospitalier, de repérer avant le 15 août des enseignements tirés de la crise. Je vous épargnerai les détails techniques, car c’est pour en avoir mal à la tête, mais on nous demande de remplir un formulaire Excel en quatre colonnes et 17 chapitres composés de 75 points au total. J’estime que cela demande plus d’une longue journée de travail d’étude de l’ensemble de mon comité directeur et des autres responsables concernés.  

Je suis tombé de ma chaise de bureau, ou presque. Bien sûr, je ne suis pas contre une évaluation pour tirer les enseignements de la crise, au contraire, c’est nécessaire ! Et mieux vaut la commencer rapidement. Mais nous venons à peine de revivre une fois de plus combien la répartition des compétences dans le secteur des soins est néfaste, et voilà que nous recevons de deux niveaux de politique différents deux questionnaires totalement divergents. Est-ce vraiment impossible de coordonner même ce genre d’enquêtes si bien que nous ne devions pas raconter la même chose à différents niveaux de façons différentes ? A un tel moment, je me demande vraiment, si la crise du Covid-19 n’a pas suffi à une prise de conscience en la matière, quelle catastrophe il faudra et combien de vies humaines devront tomber avant que l’opportunisme politique ne tienne compte de l’importance des soins au patient ?

Je ne pourrais pas le dire plus clairement !

Pr Marc Noppen Pr Marc Noppen
Pr Marc Noppen
CEO UZ Brussel

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