La réalité augmentée offre aux médecins une vision en 3D lors de la mise en place d'un drain dans le cerveau : moins de complications et moins de réinterventions
21 octobre 2025Les médecins de l'UZ Brussel qui placent un drain cérébral vital (drainage ventriculaire externe ou DVE) à l'aide de la réalité augmentée (RA) le font avec plus de précision et de succès que leurs collègues qui travaillent sans cet outil. C'est ce qui ressort d'une étude clinique pilote menée avec un nouveau système de RA, qui combine le Microsoft HoloLens II avec un système de navigation chirurgicale sur mesure. De plus, cette approche réduit les complications et diminue le risque de devoir répéter l'intervention. Le Dr Frederick Van Gestel, médecin spécialiste en formation en Neurochirurgie à l'UZ Brussel et chercheur à la VUB, a présenté les résultats sur invitation à la réunion annuelle du Congrès des chirurgiens neurologues (CNS) à Los Angeles.
Les systèmes de neuronavigation aident les chirurgiens à mieux s'orienter dans le crâne du patient lors de la planification et de la réalisation d'une intervention chirurgicale au niveau du cerveau. Les systèmes traditionnels ne peuvent être utilisés qu'en salle d'opération, car leur taille importante ne permet qu'une mobilité limitée. De plus, aujourd'hui, le chirurgien voit souvent cette navigation sous forme d'images en deux dimensions sur un écran externe et doit ensuite convertir mentalement ces informations en interprétation et en actions en trois dimensions sur le patient.
« Ce n'est certainement pas toujours facile », explique le Dr Frederick Van Gestel. « Grâce à l'intégration de la réalité augmentée (RA) pour la navigation chirurgicale, nous avons réussi à y apporter des améliorations dans le cadre de ma recherche de doctorat. »
Contrairement à la réalité virtuelle (RV), qui plonge les utilisateurs dans un monde entièrement créé par ordinateur, la RA ajoute des informations et des objets numériques à la réalité. De cette façon, ces images virtuelles semblent faire partie du monde réel. À l'aide d'écrans qu'ils portent sur la tête, les chirurgiens peuvent projeter directement sur le patient des données anatomiques spécifiques et des points de navigation chirurgicale sous forme d'informations tridimensionnelles.
Le Dr Van Gestel confirme : « Cette représentation intuitive des informations les plus importantes dans le champ de vision du chirurgien lui permet de visualiser l'anatomie interne et de mieux s'orienter dans les structures cérébrales complexes, à l'instar d'un GPS pour le cerveau humain. »
En collaboration avec une équipe d'ingénieurs de la VUB, les médecins du service de Neurochirurgie de l'UZ Brussel ont réussi à mettre au point ce système de haute technologie. Ils sont parvenus à développer leur propre système de navigation chirurgicale basé sur la RA, utilisant le Microsoft HoloLens II, qui répond avec une précision submillimétrique aux exigences strictes de précision requises pour la chirurgie du cerveau.
Etude clinique pilote : plus précis que la technique actuelle
Après des tests concluants réalisés sur des modèles en laboratoire, qui ont permis de confirmer la précision du système, la navigation chirurgicale en RA a été utilisée lors de la pose de 11 drains cérébraux (EVD) chez des patients qui en avaient besoin en urgence, par exemple après un accident ou une hémorragie cérébrale. Leurs résultats ont été comparés à ceux de 11 patients chez lesquels le drain a été posé selon la technique classique à main libre. L'étude a notamment démontré que :
- lors de l'utilisation de la RA, un placement fonctionnel permettant un drainage efficace du liquide céphalo-rachidien a été obtenu en une seule tentative dans tous les cas, contre 7 sur 11 avec la technique à main libre ;
- le placement réussi du drain dans la position anatomiquement correcte a été obtenu dans 9 des 11 placements guidés par RA (dont 8 optimaux) contre 5 des 11 placements à main levée (dont 3 optimaux) ;
- aucune réintervention n'a été nécessaire dans le groupe RA, contre 4 réinterventions avec la technique à main levée ;
- non seulement il y a eu moins de complications dans le groupe AR (2 contre 5), mais aussi que toutes les complications dans le groupe à main levée, telles que les hémorragies cérébrales, ne sont survenues que lors des réinterventions et auraient donc pu être évitées par une mise en place fonctionnelle immédiate comme dans le groupe AR.
« Lors de véritables urgences, le guidage par RA nous a permis d'améliorer la mise en place des drains dans le cerveau, ce qui a conduit à une plus grande précision et à moins de complications », explique le Dr Frederick Van Gestel. « Les réinterventions, ainsi que les multiples tentatives souvent nécessaires pour y parvenir, se sont avérées être la principale cause de toutes les complications liées à la procédure dans le groupe opéré à main levée. Cela souligne une fois de plus le risque lié aux tentatives répétées et l'importance de réussir dès la première tentative. »
Le Pr Johnny Duerinck, promoteur de la recherche et neurochirurgien à l'UZ Brussel, déclare : « Les résultats sont particulièrement encourageants, d'autant plus que le groupe AR comprenait également deux patients dont les ventricules cérébraux étaient presque entièrement obstrués, une situation qui rend normalement la pose d'un drain à main levée particulièrement difficile, voire parfois impossible. Pourtant, dans les deux cas, le drain a pu être correctement mis en place en une seule tentative grâce au guidage RA. »
Plus intuitif et plus flexible
Le Dr Van Gestel souligne que le système de RA offre non seulement plus de précision, mais aussi plus de flexibilité : « La planification préopératoire peut encore être ajustée au moment de la mise en place, notamment en cas d'effet de masse, par exemple en raison d'une hémorragie ou d'un œdème cérébral, qui empêche les ventricules cérébraux de se trouver à leur emplacement normal. Le système RA nous permet d'en tenir compte et de nous adapter à la situation spécifique de chaque patient, ce qui n'est pas évident avec la technique à main levée. »
« Cette étude est une étape importante, non seulement pour rendre la pose d'un drain cérébral plus sûre et plus fiable », confirme le Pr Michaël Bruneau, chef du service de Neurochirurgie à l'UZ Brussel, « mais aussi pour renouveler et optimiser notre façon générale de travailler, afin de rendre les soins plus intuitifs. »
Les résultats de cette recherche ont été reconnus au niveau international. En juin, le travail a fait la une de Neurosurgery, la revue scientifique la plus prestigieuse au monde dans le domaine de la neurochirurgie.
Le Dr Van Gestel a ensuite été invité à présenter ses travaux lors du congrès annuel du Congress of Neurological Surgeons (CNS) à Los Angeles. Il faisait partie des deux seuls orateurs européens à avoir été sélectionnés pour intervenir sur la scène principale, lors d’une séance plénière scientifique.
Sur la base de ces résultats prometteurs, les chercheurs préparent actuellement une étude multicentrique randomisée à plus grande échelle, prévue pour 2026.